KESSEL Joseph, ‘Fortune Carrée’

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Sortie : 1932, Chez : POCKET 631.

Joseph Kessel (1898-1970), écrivain-journaliste-aventurier, a parcouru le monde pour en ramener des récits et des romans flamboyants. Seules les deux guerres mondiales interrompirent sa création littéraire, mais aussi l’inspirèrent. Au cours de la seconde, il s’engage dans la résistance, compose et co-écrit avec son neveu Maurice Druon le Chant des Partisans, puis la termine comme capitaine d’aviation.

« Fortune Carrée » lui a été inspirée par un voyage en Mer Rouge en 1930 durant lequel il rencontra Henry de Monfreid, autre aventurier-écrivain, qui est l’un des personnages du roman, marin confirmé vivant de contrebande et de son domaine agricole perdu dans les montagnes arides. L’histoire se passe entre le Yémen, l’Ethiopie et la Mer Rouge où les personnages doivent acheminer une cargaison d’armes pour la vendre à un marchand d’esclaves. Leur route, périlleuse, passe au milieu de territoires tenus par des tribus en guerre les unes contre les autres. Leurs haines sont recuites et ancestrales, la violence est leur mode de fonctionnement dans un environnement austère composé de déserts, de minéralité et de liquide qui rend les conditions de vie extrêmes et ne pardonne pas la faiblesse.

Kessel décrit à merveille cet environnement naturel grandiose et sauvage. Il aime et admire les personnages hors du commun qu’il rencontre dans la région et qu’il met en scène dans le roman, dont un russe d’origine kirghize, ambassadeur de son pays à Sanaa avant de se consacrer à ses propres affaires dans la violence, le cynisme et une connaissance affutée de la zone et de ses tribus.

Ce roman haletant permet aussi, hélas, de réaliser qu’un siècle plus tard pas grand-chose n’a changé dans les modes de vie locaux quand le Yémen et l’Ethiopie sont quasiment en guerre permanente depuis cette époque. Kessel a toujours décrit avec force détails la violence endémique des régions qu’ils traversât et qui où se déroulent ses récits. Sans doute un peu fasciné par ces pratiques qu’il ne peut pas adopter en tant qu’homme « civilisé », il admire ces guerriers et en fait le miel de tous ces romans d’aventure qui ont bercé la première moitié du XXème siècle, une époque où les voyages se faisaient surtout à travers les romans d’aventure.