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  • CHALANDON Sorj, ‘Mon traître’.

    CHALANDON Sorj, ‘Mon traître’.

    Sortie : 2007, Chez : Editions Grasset & Fasquelle / Le Livre de Poche.

    La guerre bat son plein en Irlande dans les années 1970-1980. Mi-conflit de décolonisation de l’Irlande du Nord, mi-guerre de religion entre catholiques et protestants, elle présente en tout cas toutes les caractéristiques d’une guerre civile, terrible, sauvage, sanglante. Antoine, un luthier parisien, se trouve embarqué dans le soutien à la cause catholique, jusqu’à servir de porteur de valise aux soldats de l’IRA (Armée républicaine irlandaise). Délaissant son atelier, il se rend régulièrement à Belfast visiter ses amis républicains et partager avec eux de longues soirées arrosées dans les pubs. Tous plus ou moins militants, ils sont durs au mal, restent silencieux sur leurs activités réelles et beaucoup sont passés par la prison de Long Kesh à la sinistre réputation, celle où Bobby Sands et les siens se sont laissés mourir de faim.

    A Belfast, le climat est toujours sombre, froid et pluvieux, à l’image de cette population déchirée au milieu d’atroces combats, vengeances et règlements de compte. Mais s’il y a des militants, il y aussi des traîtres et Antoine se retrouve impliqué dans la trahison d’un des hauts commandants de l’IRA découverte après les accords de paix de 1998. Il cherche à comprendre comment et pourquoi son ami a choisi de trahir son camp, et peut-être lui-même aussi. Il n’obtient pas de réponse à son questionnement mais reste attaché à ce pays et au combat pour l’indépendance de l’Irlande du Nord.

    Sorj Chalendon est un journaliste qui a fleurté avec l’extrême gauche et participé à la fondation de quotidien Libération. Il écrit ici un passionnant et haletant roman sur ce conflit d’un autre âge qui est, hélas, toujours d’actualité.

  • « L.627 » de Bertrand Tavernier

    « L.627 » de Bertrand Tavernier

    Ce film sorti en 1992 et dont le scénario a été écrit par Bertrand Tavernier et, Michel Alexandre, un ancien policier, dépeint le quotidien d’un groupe de flics chargé de la lutte contre les stupéfiants dans le XVIIIe arrondissement de Paris. C’était en 1992 et le moins que l’on puisse dire c’est que le spectateur ressort de cette séance avec l’impression que les bases de la délinquance n’ont pas beaucoup évolué en 34 ans.

    Tavernier traite avec humour la vie de cette brigade où cohabitent des alcolos rigolards, des flics sérieux et expérimentés, d’autres plus jeunes et engoncés dans leurs principes et leurs illusions et « Lulu », le personnage principal, qui mène sa barque entre ses collègues, ses indicateurs et son amoureuse. Il n’est pas sûr que ce film aurait pu sortir en l’état en 2024 ; les dealers et les délinquants sont tous « issus de la diversité », les flics distribuent quelques baffes au passage et cultivent le Pastis autant que le code de procédure pénale, tout ceci n’est pas très « politiquement correct ».

    Même à l’époque, la sortie du film a déclenché un peu d’émotion au ministère de l’intérieur. Relatées par l’ancien flic co-scénariste, toutes les anecdotes mentionnées dans le film seraient réelles. Cette œuvre est surtout un hommage à ces policiers avec leurs défauts et leurs qualités, mais le plus souvent passionnés par leur mission et inspirés par la solidarité des frères d’arme pour la mener à bien.

    On peut sans doute penser que trente ans plus tard les flics se sont considérablement professionnalisés (comme les voyous d’ailleurs) et picolent moins que dans le film…

  • Festival Rock en Seine – 2024/08/24>25 – Paris Parc de Saint-Cloud

    Festival Rock en Seine – 2024/08/24>25 – Paris Parc de Saint-Cloud

    Samedi 24 août 2024

    Voici 10 ans que l’on n’avait plus fréquenté les pelouses du parc de Saint-Cloud pour le festival Rock-en-Seine. Depuis l’édition de 2014 plus exactement, celle d’un émouvant concert de Portishead le samedi soir. Le cadre n’a pas changé, peut-être une scène de plus, la Firestone ? Les fumets de merguez flottent toujours dans la partie centrale.

    En revanche l’incontournable coin LGBTQIA+ a été ajouté aux différents stands et un système cashless bien pratique est désormais obligatoire pour consommer. Un QR code a été ajouté au bracelet délivré à l’entrée qui se recharge avec sa carte de crédit, il y a même un comptoir d’aide pour les vieux qui n’arrivent pas à recharger leurs bracelets.

    Et puis, aux contrôles d’entrée, ceux qui ont mal cachés leurs produits illicites se les font confisquer par les cerbères plutôt aimables.

    On vit vraiment une époque formidable, bienvenue au 20e festival Rock-en-Seine !

    The Kills (grande scène)

    Le duo The Kills parait sur la grande scène : lui (Jamie Hince) en costume noir fines raies grises et mocassins blancs, breloques dorées autour du cou ; elle (Alison Mosshart) en collant noir et veste léopard, cheveux longs blonds sur racines noires. Leur jeu est maintenant bien rodé depuis presque 25 ans qu’ils tournent ensemble. La rythmique est enregistrée sur bande et ils insèrent sur ce son basique un rock brut fait de guitares métalliques, au besoin dissonantes, et la voix sauvage d’Alison qui parcourt la scène comme une panthère en cage. Il y a une énergie sexuelle dans ce groupe post-punk. Le jeu de guitare ne fait pas dans l’harmonie mais plutôt dans l’atonal, servi par un virtuose qui prolonge le garage-rock avec brio.

    Mais on les quitte avant la fin du show pour être présent au démarrage des Blonde Redhead sur la scène de la Cascade.

    Setlist : Kissy Kissy/ U.R.A. Fever/ Love and Tenderness/ 103/ Going to Heaven/ Baby Says/ New York/ Wasterpiece/ Black Balloon/ Last Day of Magic/ LA Hex/ My Girls My Girls/ Doing It to Death/ Future Starts Slow

    Blonde Redhead (scène de la Cascade)

    Après la furie des Kills, les Blonde Redhead nous offre un concert tout en délicatesse. Le fond de la scène est décoré de longues banderoles verticales en tissu sur lesquelles sont brodés des motifs étranges et un peu enfantins. On se croirait dans un temple tibétain.

    Le groupe a sorti un nouveau disque en 2023, Sit Down for Dinner, que l’on ne connait pas encore très bien. Lancé au début des années 1990 par deux jumeaux italiens, Amadeo (guitare et chant) et Simone (batterie) Pace, associé à la japonaise Kazu Makino (chant, clavier et bass), le groupe dégage un charme exceptionnel. Avec dix albums à leur actif, ils organisent leurs tournées dans des salles de taille moyenne, privilégiant l’intimisme de leur musique romantique.

    Amadeo porte une tenue blanche avec un pantalon moucheté de petites broderies, et un bandana turquoise. Kazu, en short, affiche un large foulard façon keffieh mais qui doit plutôt illustrer ses origines japonaises. Dès que la musique démarre son expression corporelle est renversante : elle danse avec une grâce merveilleuse, les genoux fléchit elle ondule comme une liane autour de sa guitare qui reste l’élément fixe de sa chorégraphie. Même derrière son clavier elle bouge avec un érotisme torride. Sa voix haut perchée dans les aigues est brumeuse et bouleversante. Elle se loupe sur l’introduction de Sit Down for Dinner et le groupe reprend l’intro en souriant.

    Et lorsque Blonde Redheads joue ses classiques Dr. Strangeluv et 23, tout en douceur,le public frissonne et quelques gouttes de pluie viennent masquer l’émotion. Les caméras montrent les Kills qui sont en coulisse. Ce festival démarre magnifiquement bien.

    Setlist : Falling Man/ Dr. Strangeluv/ Doll Is Mine/ Elephant Woman/ Snowman/ Melody Experiment/ SW/ Sit Down for Dinner, Pt. 1/ Sit Down for Dinner, Pt. 2/ Spring and by Summer Fall/ 23/ Kiss Her Kiss Her

    The Offsprings (grande scène)

    On repasse ensuite sur la grande scène pour la la fin du show de The Offsprings. Du rock californien post-punk qui dépote. La soirée s’annonce chaude sur Saint-Cloud.

    Massive Attack (grande scène)

    On n’avait plus vu Massive Attack sur une scène française depuis la tournée Mezzanine XXL et leurs deux concerts au Zénith parisien en 2019. Angelo Bruschini leur guitariste depuis des années est mort l’an passé, il est remplacé ce soir par deux guitaristes, plus discrets et moins flamboyants que leur prédécesseur. Les Massive Attack jouent toujours avec le concept de géométrie variable autour de leur noyau dur Robert Del Naja (3D) et Grant Marchall (Daddy G). Ce soir les invités sont le groupe Young Fathers, l’Ecossaise Elisabeth Fraser (ex-Cocteau Twins qui chantait sur l’album Mezzanine en 1998 et lors de la dernière tournée) et Deborah Miller, chanteuse habituée des concerts de Massive Attack.

    Le show est sans trop de surprises mais délivre toujours autant de bonheur. Pendant que la nuit tombe sur le parc le beat lourd et hypnotique des Massive Attack monte vers Saint-Cloud tandis que les voix de 3D et Daddy G déjà se répondent sur Risingson. Horace arrive sous ses dreadlocks pour chanter sur Girl I love You extrait du dernier disque studio du groupe, Heligoland, qui remonte déjà 14 ans (2010). Les nappes de clavier et la bass hypersonique enrobent le tremolo inimité d’Horace Andy qui remporte toujours un franc succès sur scène :

    Girl, I love you but your loving has gone
    Forever
    Gonna miss you but my love has gone
    Forever

    Elisabeth Fraser fait son apparition pour Black Milk. Cheveux uniformément blancs et lunettes à grosses montures, sa voix aérienne et mystérieuse fait toujours des merveilles dans les hauteurs où l’emmènent les sons de Massive Attack. Cette voix d’ange se marie exceptionnellement avec la noirceur de la musique.

    Le trio Young Fathers est aussi de la partie ce soir comme lors de la tournée XXL. Les Massive Attack les ont pris sous leurs ailes. Etonnant d’ailleurs, ils sont un peu trop hip-hop et pas assez trip-hop. La pulpeuse Deborah Miller vocalise sur Safe from Harm avec sa voix d’opéra d’une énergie dévorante pendant que 3D déroule son chanter-parler obsédant et électronique :

    Serious, in-, serious, in-
    Serious, infectious, and dangerous
    Friends and enemies, I find it’s contagious
    I was looking back to see if you were looking back at me
    To see me looking back at you

    Le show est grandiose, ponctué des messages politiques auxquels tient le groupe dont son soutien au combat palestinien qui rencontre un franc succès à Saint-Cloud lorsque « STOP GENOCIDE » s’affiche sur les écrans. Modernité et obscurité accompagne cette musique sortie des tréfonds de la terre pour percuter nos âmes. Il n’y manque qu’un peu de nouveauté pour les habitués de leurs concerts.

    Pas de CD annoncé pour le moment !

    Setlist : (Gigi D’Agostino cover)/ Risingson/ Girl I Love You (with Horace Andy)/ Black Milk (with Elizabeth Fraser)/ Take It There/ Gone (with Young Fathers)/ Minipoppa (with Young Fathers)/ Voodoo in My Blood(with Young Fathers)/ Song to the Siren (Tim Buckley cover) (with Elizabeth Fraser)/ Inertia Creeps/ Rockwrok (Ultravox cover)/ Angel (with Horace Andy)/ Safe From Harm (with Deborah Miller)/ Unfinished Sympathy (with Deborah Miller)/ Karmacoma/ Teardrop (with Elizabeth Fraser)/ Levels (Avicii cover)/ Group Four (with Elizabeth Fraser)/ In My Mind (Gigi D’Agostino cover) (Reprise)

    Dimanche 25 août 2024

    Roisin Murphy

    Roisin Murphy, une blonde Irlandaise déjantée : habillée en jupe noire, chemisier blanc et chaussures vernies à talons, elle change de veste à chaque chanson, passant du boa synthétique à la tenue smoking. Ses musiciens alternent leurs instruments avec des machines. Le tout donne un mix entre électro et musique de cabaret. La personnalité originale de Roisin donne une sacrée saveur à l’ensemble. Une belle découverte !

    PJ Harvey (grande scène)

    Le concert de PJ Harvey se déroule au crépuscule sur la grande scène. Celle-ci est décorée avec du mobilier d’intérieur cosy : une table avec des chaises où la chanteuse s’assoit parfois pour boire un thé, une écritoire où elle déplie son cahier d’écolier et y prend des notes…

    Le fidèle ami et musicien John Parish, multi-instrumentiste et arrangeur-producteur de nombre des disques de PJ est présent. A la batterie, une vieille connaissance aussi, le batteur français Jean-Marc Butty. Le reste des musiciens assurent leur partie avec discrétion derrière Poly Jean qui apparaît, telle une vestale, habillée d’une longue robe blanche sur laquelle elle porte une cape pour les premiers morceaux avant d’enlever celle-ci, dévoilant les dessins de la robe dont elle nous expliquera qu’ils ont été réalisés par les membres du groupe à chacune des étapes de leur tournée européenne qui se termine ce soir à Saint-Cloud.

    Le groupe joue ses classiques avec un beau retour sur le CD Let England Shake pour lequel elle prend sa guitare sur The Glorious Land, l’histoire désespérée des combattants britanniques de la première guerre mondiale, et la cithare pour The last living rose.

    Sur le déchirant Down by the Water, l’histoire d’un infanticide commis par une mère qui noie sa fille, elle assure les percussions avec deux petites baguettes en bois qu’elle frappe en rythme devant son micro :

    I lost my heart
    Under the bridge
    To that little girl
    So much to me

    Little fish. big fish. swimming in the water.
    Come back here, man. gimme my daughter.

    Et on continue dans la nostalgie avec The desperate kingdom of love presque chanté a cappella sur quelques notes de guitare. Et le concert se termine sur un énergique To bring you my love datant de 1995 et soulevant toujours l’enthousiasme.

    PJ Harvey et ses fidèles musiciens déroulent avec toujours autant de subtilité un rock alternatif de tendance arty. Poétesse inspirée, auteur-compositrice de talent, multiinstrumentiste assumée, elle creuse son sillon solitaire et singulier depuis la fin des années 1980 au sein d’un rock britannique qui ne manque certainement pas de personnalités originales.

    Un beau concert !

    Setlist : Prayer at the Gate/ The Nether-Edge/ I Inside the Old Year Dying/ The Glorious Land/ Let England Shake/ The Words That Maketh Murder/ A Child’s Question, August/ I Inside the Old I Dying/ Send His Love to Me/ 50ft Queenie/ Black Hearted Love (PJ Harvey & John Parish cover)/ Angelene/ The Garden/The Desperate Kingdom of Love/ Man-Size/ Dress/ Down by the Water/ To Bring You My Love

    Pixies (scène de la Cascade)

    Et on poursuit dans le rock alternatif avec les Américains de Pixies menés par Black Francis. Guitariste lui-même il est également épaulé par le guitariste historique du groupe : Joey Santiago, et il faut dire que ces deux-là font bruyamment le spectacle. Le groupe fondé en 1986 a été novateur dans le mouvement post-punk américain et a inspiré nombre de musiciens bien au-delà de leur continent. Une musique simple faite d’alternances entre couplets calmes et refrains endiablés dans lesquels se déchaînent la rythmique et les guitares. Les textes de Black Francis sont beaucoup plus mystérieux, souvent inspirés par la Bible et autres fantasmes de cet auteur-compositeur.

    Bref, un rock dur et régénérant qui ravit l’assistance. Assister à un concert des Pixies donne le sentiment de partager un moment avec un mythe musical. La foule reprend en chœur le final sur Where is my mind? Une chanson de 1988 inspirée à Francis par une expérience de plongée sous-marine dans les Caraïbes et reprise un nombre incalculable de fois par d’autres groupes ou utilisée dans des films, des publicités, des défilés de mode… Un marqueur des Pixies !

    Setlist : Gouge Away/ Wave of Mutilation/ Head On (The Jesus and Mary Chain cover)/ Isla de Encanta/ Monkey Gone to Heaven/ Caribou/ Hey/ Mr. Grieves/ Debaser/ Bone Machine/ Tame/ The Vegas Suite/ Chicken/ Velouria/ The Happening/ In Heaven (Lady in the Radiator Song) (Peter Ivers & David Lynch cover)/ Vamos/ Here Comes Your Man/ Wave of Mutilation (UK Surf)/ Where Is My Mind?/ Winterlong (Neil Young cover)

    LCD Soundsystem (grande scène)

    Le groupe a bien grandi depuis le festival des Inrocks en 2004 où il s’était produit en trio pour un set incendiaire. Aujourd’hui il assure la soirée de clôture du festival parisien. Ils sont désormais nombreux sur scène et jouent avec brio une musique plus détendue toujours sous la houlette de l’américain James Murphy.

    La musique reste basée sur une rythmique répétitive et obsédante mais la multiplicité des musiciens et des instruments la rend plus fluide. La mise en scène est aussi plus colorée. Les musiciens sont habillés de façon bigarrée, notamment le guitariste leader qui a le visage peint en bleu et rouge au niveau des yeux et porte un chapeau de paille. Les claviers principaux sont assurés par deux femmes d’origine asiatique, les autres musiciens alternent leurs instruments avec des machines. L’ensemble est terriblement entraînant et cette formation montre son incroyable capacité à produire et tenir ces rythmes mécaniquement, avec des humains jouant d’instruments, plutôt qu’avec de l’électronique pure. Bien sûr les machines se mêlent aussi aux instruments pour produire cette réjouissante fusion sur laquelle se pose la voix saccadée de Murphy. LCD Soundsystem produit ce soir un mix harmonieux entre l’électronique, les instruments et le chant. Une très belle évolution de ce groupe américain original.

    Malgré cet enchantement rythmique et musical, le chroniqueur, un peu fatigué rentre chez lui avant la fin du show. Son absence ne sera pas remarquée par l’enthousiaste James Murphy qui lui pardonnera certainement…

    Setlist : Song played from tape, Real Good Time Together (Lou Reed song)/ Get Innocuous!/ I Can Change (Intro featured a « Radioactivity » (Kraftwerk) snippet)/ You Wanted a Hit/ Tribulations/ Movement/ Tonite/ Someone Great (Dedicated to Justin Chearno, who passed away on 23rd August, «Your Silent Face» – New Order outro)/ Losing My Edge ((with snippets of « Ghost Rider » by Suicide, « Robot Rock » by Daft Punk and « Don’t Go » by Yazoo))/ Home/ Dance Yrself Clean/ New York, I Love You but You’re Bringing Me Down/ All My Friends/ Song played from tape, Shout (Tears for Fears song)

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  • L’invasion allemande des Birkenstock

    L’invasion allemande des Birkenstock

    L’Allemagne est une grande nation qui a significativement participé à l’élaboration de la culture occidentale, de la musique à la philosophie, en passant par la peinture, la poésie ou le cinéma. Goethe, Brahms, Kant, Hegel, Arendt… ne sont que quelques grands noms extraits de la longue liste des intellectuels allemands qui ont marqué l’époque contemporaine. Le pays a également un côté sombre qui a mené aux dérives des années 1930 où l’idéologie nazie a dévasté l’Europe.

    Le 25 août 1944, le Général von Choltitz remettait la reddition de l’armée allemande occupant Paris au Général Leclerc et au chef communiste résistant Rol-Tanguy. 80 ans plus tard, l’Allemagne qui a réintégré ses frontières historiques continue à envahir l’Europe, et même le monde, avec un outil certes bien plus pacifique mais toujours très voyant. La sandale Birkenstock a été adoptée par une grande partie de la population mondiale. En France elle est portée à la ville comme à la plage et les Français semblent heureux de s’afficher avec ce godillot lourd et inélégant, fruit d’un improbable croisement entre le sabot paysan et la tong estivale. Le résultat est plutôt affligeant mais le porteur de sandales Birkenstock affiche une satisfaction non dissimulée de vivre ses pieds à l’air (et à l’aise) dans ses sandales.

    Birkenstock est le nom du cordonnier qui a créé la société en 1774, « pionnière dans le domaine de la santé du pied » mais c’est surtout à la fin du XXème siècle que cette godasse teutonne a envahi nos plages et nos trottoirs. C’est regrettable car le résultat esthétique est peu reluisant. L’Allemagne nous avait habitué à mieux !

    Lire aussi : « Paris brûle-t-il ? – Quand le cinéma réinvente la Libération » au musée de la Libération de Paris
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  • La Corse à la recherche de grands hommes

    La Corse à la recherche de grands hommes

    Le chef corse indépendantiste Jean-Guy Talamoni (avec un ‘i’ muet) a publié une chronique inattendue dans le journal Le Monde du 15 août intitulée « La Corse doit se réapproprier l’ensemble des grandes figures de son histoire, et singulièrement celle de Napoléon ». Il a passé une partie de son été à présenter dans les villages de son pays le film d’Abel Gance « Napoléon » tourné en 1927. Il rappelle avec force que Napoléon (1769-1821) était corse et reproche bien entendu aux Français de s’approprier sa gloire en laissant les aspects sanglants de celle-ci à son ile natale. Il admet que Napoléon ne fait pas l’unanimité en Corse, certains le considérant comme traître à la « cause nationale corse » dès qu’il fut aspiré par son destin guerrier européen, lui préférant Pascal Paoli (1721-1807), le « père de la patrie corse ». Talamone se réaffirme « paoliste » mais sans toutefois rejeter complètement le « bonapartisme ».

    En réalité, ce micro-pays de Corse est à la recherche de grands hommes pour fonder ses convictions et ses passions, et il n’en trouve pas beaucoup. C’est le syndrome de ces confettis de l’Empire qui rejettent les héros français par haine du colonisateur et aimeraient bien y substituer des natifs de leurs pays. Mais on ne fonde pas une histoire ni une pensée unitaire sur des mafieux ou des joueurs de fouteballe.

    Le cas de la Martinique, autre confetti de l’empire, est révélateur à cet égard. Aimé Césaire (1913-2008), poète, penseur de la « négritude » et homme politique a « régné » sur la Martinique jusqu’à sa mort à 94 ans, laissant une œuvre littéraire et politique considérable, forgeant le respect du monde culturel et politique bien au-delà de la Martinique et de la France. Même si la proportion de Martiniquais ayant lu ses publications est sans doute assez modeste, il réunissait sur son nom, par le respect qu’il inspirait dans le monde, les Martiniquais qui étaient fiers de lui. Ils avaient trouvé un héros local qui les a valorisés. A l’inverse, la Guadeloupe voisine, qui n’est pas en très bons termes avec la Martinique, n’a pas trouvé de héros unanime à qui se référer et c’est sans doute aussi l’une des raisons qui explique son retard économique et culturel par rapport à la Martinique.

    Alors suivons Talamone et favorisons l’appropriation de Napoléon par la Corse. Paris pourrait au besoin y transférer les cendres du grand homme si ce pouvait être un gage d’apaisement et de sérénité pour ce territoire dans sa route heurtée vers l’indépendance.

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    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/08/15/jean-guy-talamoni-la-corse-doit-se-reapproprier-l-ensemble-des-grandes-figures-de-son-histoire-et-singulierement-celle-de-napoleon_6281711_3232.html

  • Le trio Wanderer au festival de musique de chambre de Perros-Guirec

    Le trio Wanderer au festival de musique de chambre de Perros-Guirec

    C’est le dernier concert du festival ce soir qui accueille le Trio Wanderer (piano, violon et violoncelle) pour interpréter un joli programme.

    Le Trio n°1 de Bedrich Smetana compositeur tchèque (1824-1884) qui composa cette œuvre après la mort de sa fille de 5 ans, comme une thérapie face au drame, avec un premier mouvement particulièrement lancinant et douloureux avant que les deux derniers mouvements redonnent goût à la vie.

    « La Vallée d’Oberman » est une transcription pour trio d’une composition pour piano de Liszt (1811-1886). Entreprise par un de ses élèves elle a été finalisée par Liszt lui-même, qui par ailleurs était un soutien musical et financier de Smetana. Cette œuvre invite à la méditation avec un sublime dialogue entre violon et violoncelle.

    Et après l’entracte les Wanderer interprètent le Trio pour piano et cordes n°4 de Dvorak (1841-1904) composés de six danses enthousiasmantes dans une atmosphère slave, entre rire et larmes.

    Rappelons-le, « Wanderer » signifie vagabond/voyageur en allemand. Ce fut un beau voyage musical offert ce soir.

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  • Mais quand vont-ils se taire !

    Mais quand vont-ils se taire !

    Le problème avec la mort d’un artiste c’est que l’on ressort immanquablement Jack Lang et Line Renaud de leur naphtaline pour leur demander leur avis nécrologique. Ce matin, la France estivale a appris le décès de l’acteur Alain Delon. Aussitôt Jack et Line se sont exprimés sur divers réseaux dits « sociaux ». A quoi peuvent donc bien servir les commentaires de Line Renaud (96 ans) et Jack Lang (84 ans) sur la carrière et la personnalité d’un acteur décédé ?

  • de MONTHERLANT Henry, ‘Les bestiaires’.

    de MONTHERLANT Henry, ‘Les bestiaires’.

    Sortie : 1954, Chez : Librairie Gallimard / Livre de Poche n°268.

    Henry de Montherlant (1895-1972) est un romancier, dramaturge et essayiste français qui connut son heure de gloire au cours des années 1939-1970, dont on ne parle plus beaucoup aujourd’hui. Passionné de tauromachie (qu’il a lui-même un peu pratiqué) il consacre « Les bestiaires », ce roman des débuts, à l’univers espagnol des taureaux et du combat mené par les hommes contre ces bêtes, érigé en acte de suprême noblesse.

    Nous suivons ainsi le parcours d’Alban de Bricoulle dans les corridas de Séville où ses parents ont consenti à le laisser s’installer pour quelques semaines. La fascination d’Alban pour les monstres élevés pour leur violence ne l’empêche pas de chercher à séduire une jeune fille de la noblesse espagnole, elle aussi élevée dans le culte du taureau. Elle pousse Alban à toréer une bête dangereuse avant d’accepter de poursuivre son amourette avec lui. Il relève le défi, mais c’est pour mieux la délaisser ensuite, cette femme qui ose lui poser ses conditions. Nous sommes dans un monde de fierté et d’honneur !

    Le style de l’écrivain est foisonnant. Ses descriptions des taureaux dans les élevages et des combats dans l’arène sont stupéfiants de précision et de ferveur. La passion de la tauromachie et le talent de l’auteur font vivre au lecteur la frénésie de tout un peuple pour cette activité désormais d’un autre âge. Spécialiste de la Rome antique, il mêle dans ce roman les références aux civilisations du bassin méditerranéen pour illustrer l’importance du combat hommes-taureaux comme élément fondateur de notre civilisation.

    Le roman est d’ailleurs précédé d’une lettre que Montherlant adressa au président de la République, Gaston Doumergue, pour l’honorer d’avoir rétabli les « courses » de taureaux avec mise à mort dans le sud de la France après qu’elles eussent été suspendues par le parlement. Quoi que l’on pense de la tauromachie, ce court roman de jeunesse en restitue les passions avec brio.

  • MORAVIA Alberto, ‘La désobéissance’.

    MORAVIA Alberto, ‘La désobéissance’.

    Sortie : 1949, Chez : Editions Denoël / Le Livre de Poche

    Alberto Moravia (1907-1990) est un écrivain et journaliste romain d’autant plus célèbre en Italie qu’il épousa pour un temps Elsa Morante, elle aussi fameuse écrivaine dans la péninsule.

    Lire aussi : MORANTE Elsa, ‘La Storia’.
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    Avec « La désobéissance » nous suivons les états d’âme d’un adolescent en 1940, Luca, dans le rejet de ses parents, de leur éducation et de tout ce qu’ils représentent. Il traîne sa déprime de l’école à son domicile, rien de l’intéresse, tout le fatigue. Sans espoir sur le futur, il décide de se laisser mourir sous les yeux de ses parents qui sont largement dépassés par la situation, sans comprendre que leur fils organise sa fin. Il cesse de s’alimenter et de socialiser. Il finit par effectivement tomber malade. Entre coma et délire, l’infirmière qui s’occupe de lui saura le ramener à la vie en attisant puis satisfaisant son désir.

    Moravia décrit froidement le processus dépressif qui emmène Luca vers l’abyme. Avec une minutie proustienne il rentre dans les pensées noires de l’adolescent qui ne voit plus de raisons de poursuivre la vie. La spirale du vide remplace progressivement ses émotions et ses pensées. C’est le désir charnel qui va finalement le sauver !

  • PAGNOL Marcel, ‘Souvenirs d’enfance 2/3 Le château de ma mère’.

    PAGNOL Marcel, ‘Souvenirs d’enfance 2/3 Le château de ma mère’.

    Sortie : 1958, Chez : Editions de Fallois (1988).

    Marcel Pagnol (1895-1974) est un écrivain qui a diffusé le chant des cigales et la gaieté méditerranéennes dans toute la France et au-delà. Cinéaste, il a tourné ou collaboré à des réalisations de ses pièces de théâtre Topaze, Marius, Fanny, César… Après avoir été élu à l’académie française une fois la guerre terminée il se consacre à la rédaction de ses souvenirs d’enfance à la fin des années 1950, dont « Le château de ma mère » est le second tome.

    Ce volume est cette fois-ci consacré à sa mère, cette femme aimante et paisible, occupée à préparer ses trois enfants à la vie, fidèle compagne de son mari instituteur républicain. Tellement heureux de leur séjour estival à la « Bastide Neuve » dans les collines provençales, ils décident d’y aller désormais tous les week-ends de l’année, hiver compris, où les rejoint parfois l’oncle Jules à vélo depuis Marseille. C’est à chaque fois une expédition mémorable si drôlement racontée par le petit Marcel qui retrouve son ami Lili pour des courses interminables dans le pays enchanteur.

    On apprend à la dernière page que sa mère-chérie, Augustine, décède alors qu’il n’a que quinze ans. Puis son frère, « le petit Paul », vingt années plus tard. Des évènements tragiques et inattendus qui précipitent Marcel dans la vie adulte où tout n’est pas aussi doux qu’une journée de cavalcades dans les collines. Marcel Pagnol, l’écrivain, n’en a pas perdu pour autant toute la tendresse et l’humour avec lesquels il parle des siens et de cette Provence qu’ils chérissent tant.

  • L’Ukraine engagée au Mali ?

    L’Ukraine engagée au Mali ?

    Il semble que les mercenaires russes qui appuient l’armée malienne contre les terroristes religieux aient subi une défaite dans le désert, au village de Tinzawaten. Une soixantaine de cadavres d’hommes blancs auraient été répertoriés. L’Ukraine aurait fourni du renseignement aux terroristes sahariens pour faciliter leur victoire suivant le grand principe : « les ennemis de mes ennemis sont mes amis ». Un responsable militaire ukrainien a plus ou moins confirmé cet engagement de son pays contre les mercenaires russes au Sahel. Vu le pédigré des terroristes maliens en question, une association de circonstance entre des islamistes et des indépendantistes touareg, il n’est pas bien sûr que l’Ukraine ait misé sur le bon cheval mais on peut imaginer que tout ce qui peut nuire à la Russie intéresse Kiev. On peut se demander de quel type de renseignements pouvait bien disposer l’Ukraine sur le Sahel pour aider à cette défaite russe ? Le Sahara est tout de même assez éloigné des plaines ukrainiennes et sans doute pas au cœur des préoccupations de Kiev pour le moment…

    Bien entendu le vieux réflexe des anciens pays colonisés par la France d’accuser Paris d’être responsable de tous leurs malheurs joue encore aujourd’hui et l’Alliance des Etats du Sahel (AES), qui réunit le Mali, le Niger et le Burkina-Faso après que ceux-ci ont eu quitté la CDEAO et se soient rapprochés de la Russie, publie le communiqué rageur ci-dessus le 5 août.

    La France impliquée dans un jeu dangereux au Mali, aux côtés de l’Ukraine et de groupes terroristes !

    AES (https://x.com/AESinfos/status/1820574117269241994)
    Lire aussi : Le Mali, le Burkina-Faso et le Niger se retirent de la CEDEAO
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    La présence de l’Union soviétique et de son allié cubain a marqué les pays africains après leurs indépendances dans les années 1960. Nombre d’entre eux ont d’ailleurs adopté le communisme comme programme politique sous couvert du « non-alignement » qui était en fait le faux-nez de Moscou contre les prétentions occidentales dans les pays nouvellement indépendants. Le Bénin, le Mali, la Guinée, l’Ethiopie, le Congo-Brazzaville, l’Egypte de Nasser, le Congo-Zaïre de Lumumba, l’Algérie, notamment, ont pactisé avec le grand frère soviétique et érigé parfois des dictatures sanguinaires, parfois des régimes qui n’avaient de communiste que le nom. A Moscou, l’université baptisée « Patrice Lumumba » a accueilli, et accueille toujours, nombre de cadres africains.

    Le retour de la Russie en Afrique n’est pas véritablement une surprise puisqu’elle y fut très présente jusqu’à la dissolution de l’URSS en 1991. Ce qui est nouveau en revanche est que l’ex-Union soviétique, maintenant réduite à la simple Fédération de Russie, qui reste tout de même en surface le pays le plus grand de la planète, s’y affronte avec l’Ukraine son ancien vassal. L’idéal serait tout de même que l’Afrique, après s’être débarrassée de ses colonisateurs, avoir abrité les conflits de la guerre froide, arrive à concevoir désormais son avenir sans plus d’interventions extérieures. Elle n’en prend pas le chemin, hélas.

    Pour le moment la Russie a perdu une bataille dans le désert, mais sans doute pas la guerre. Son plus grand défi reste d’ailleurs de ne pas être de nouveau rejetée par les populations comme le fut l’URSS à peu près partout sur le continent. Rendez-vous dans trente ans pour faire le bilan de ce nouvel activisme russe en Afrique.

  • « Le Caïman » de Nanni Moretti

    « Le Caïman » de Nanni Moretti

    Nous sommes en Italie dans les années 1980, un producteur de film voit sa vie s’effilocher, sa femme le quitte, ses productions ne rencontrent plus de succès, les acteurs abandonnent ses projets de film à peine commencés, il dort dans son bureau, ment à ses enfants pour les préserver de cette existence à la dérive… Mais toujours optimiste il finit par croiser une jeune réalisatrice qui lui propose un film sur Berlusconi (le « caïman » comme il était baptisé dans le milieu politique italien). Avec sa jeunesse et ses convictions elle va relancer ce producteur, un peu amoureux d’elle bien sûr, au point que le spectateur peut espérer le voir se réconcilier avec sa femme et que le film sur Berlusconi est tourné et devrait rencontrer le succès.

    Moretti traite avec son humour léger et latin cette situation toujours à la limite du tragique magnifiquement jouée par Silvio Orlando parfait dans son rôle de clown triste. Nanni Moretti endosse le rôle de Berlusconi dans la scène finale du film, en clown cette fois-ci très politique, condamné mais s’estimant victime des communistes et de la gauche : il est acclamé à la sortie du tribunal alors que le juge est hué.

  • PAGNOL Marcel, ‘Souvenirs d’enfance 1/3 La gloire de mon père’.

    PAGNOL Marcel, ‘Souvenirs d’enfance 1/3 La gloire de mon père’.

    Sortie : 1957, Chez : Editions de Fallois (1988).

    Marcel Pagnol (1895-1974) est un écrivain qui a diffusé le chant des cigales et la gaieté méditerranéennes dans toute la France et au-delà. Cinéaste, il a tourné ou collaboré à des réalisations de ses pièces de théâtre Topaze, Marius, Fanny, César… Après avoir été élu à l’académie française une fois la guerre terminée il se consacre à la rédaction de ses souvenirs d’enfance à la fin des années 1950, dont « La gloire de mon père » est le premier tome.

    Vu au travers les yeux de l’enfant d’une dizaine d’années qu’il était, Pagnol raconte sa vie entre son père, instituteur laïque, sa mère, femme d’intérieur, son oncle fonctionnaire catholique de base, un petit frère, une petite sœur et un petit cousin. Tout ce monde habite Marseille au début du XXe siècle, une vie qui sent bon le pastis et l’accent marseillais, d’autant plus que la famille va louer à l’année une maison très sommaire, la fameuse « Bastide neuve » dans les hauteurs provençales. Et c’est là que Marcel va découvrir l’amitié avec Lili, le fils d’un paysan local, qui va l’initier aux folles cavalcades dans la garigue pour poser des pièges à oiseaux qui seront rôtis pour servir de dîner.

    Marcel aide aussi son père à se montrer à la hauteur de l’oncle Jules pour la chasse dans laquelle ils se lancent corps et âme à l’aube tous les matins dès l’ouverture. Tout cela est tendre et émouvant, le jeune « de la ville » découvre avec émerveillement la garigue, les senteurs du thym et des oliviers et le braconnage guidé par son ami Lili. Le récit est aussi plein d’humour notamment les « escagasseries » sur la laïcité, entre père et oncle, interprétées par un gamin..

    C’est une touchante et naïve déclaration d’amour à la Provence et à son père, ce héros.

  • PéAN Pierre, ‘Main basse sur Alger – enquête sur un pillage / juillet 1830’.

    PéAN Pierre, ‘Main basse sur Alger – enquête sur un pillage / juillet 1830’.

    Sortie : 2004, Chez : Plon.

    Pierre Péan (1938-2019) est un journaliste d’investigation, plutôt tourné vers la polémique, qui s’est spécialisé dans les relations entre la France et l’Afrique, avant et après la décolonisation. Il nous livre ici sa version de la véritable raison de l’invasion de l’Algérie en 1830 par les troupes commandées par le maréchal de Bourmont, sous l’autorité du roi Charles X. Il apparaît que le dey d’Alger, le plus haut représentant ottoman sur place qui avait autorité sur Alger et une bonne partie du pays, était à la tête d’un trésor assez significatif qui aurait attiré les convoitises de Charles X pour financer ses opérations secrètes contre son opposition menée par Louis-Philippe car la révolte grondait en France et allait aboutir à la révolution de 1830 qui fit tomber Charles X et mena à son remplacement par Louis-Philippe. A priori les fonds volés au dey d’Alger arrivèrent bien tard et ne purent sauver la couronne de Charles X.

    Officiellement l’expédition de 1830 fut initiée pour se venger de l’affront diplomatique qui vit le dey « souffleter » le consul de France pour une histoire de dette française (déjà…) non réglée à Alger. Péan affirme que ce ne fut qu’un prétexte car la véritable motivation était de mettre la main sur le magot estimé à plusieurs milliards d’euros en valeur d’aujourd’hui. Une part fut quand même remise au Trésor public et rentra officiellement dans les caisses de l’Etat français, mais une autre partie, non négligeable, aurait été orientée vers les fonds secrets à la disposition du roi, le solde étant pillé par les officiers et les soldats de l’expédition.

    La thèse du sac d’Alger est fort plausible, elle n’est d’ailleurs pas incompatible avec celle du coup d’éventail porté par le dey au consul. A l’époque, lorsqu’un empire européen envahissait un pays africain ce n’était pas pour y conter fleurette et d’ailleurs l’Algérie fut annexée à la France au royaume de France en 1834 après une conquête violente.

    Par contre, ce que Péan ne dit pas dans son enquête c’est d’où venait ce trésor du dey d’Alger ? Tout à son souci permanent de plonger dans la noirceur de l’histoire de France il semble en oublier que les pratiques ottomanes n’étaient pas non plus particulièrement tendres à l’égard des pays occuppés par l’empire ottoman… Les Barbaresques ont écumé la Méditerranée durant des siècles à partir du XVIe, moitié-pirates, moitié-corsaires, le principe était que des navires musulmans attaquent les bateaux chrétiens, notamment pour y capturer de futurs esclaves. Nombre de villes côtières du nord furent aussi razziées par les Ottomans qui remontèrent jusqu’en Grande-Bretagne et même en Islande pour exercer leur traffic d’esclaves. Alger était l’une des places fortes de la piraterie ottomane. L’origine du magot du dey d’Alger pillé par la France en 1830 n’était sans doute pas aussi blanche que la colombe mais Pierre Péan reste muet sur ce sujet…

  • La dépense en chantant

    La dépense en chantant

    A l’occasion de la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques PARIS-2024 ce 26 juillet, les Français ont vu défiler leurs impôts sur la Seine malgré la pluie battante qui ne semble pas avoir freiné l’ardeur des acteurs de ce show ni de leurs spectateurs. Tout ceci a déjà coûté très cher aux contribuables, mais telles les cigales dans la fable, il leur restera l’hiver pour pleurer et… payer.

    Le spectacle était à la hauteur des dépenses engagées, un peu clinquant mais bon-enfant. Quelques imprévus, Lady Gaga interprétant du french-cancan, un cavalier mécanique qui remonte le fleuve, Imagine de John Lennon très bien interprété par une chanteuse française sur un radeau électrique à côté d’un piano à queue. Du plus classique : des transgenres, des femmes à barbe et la communauté LGBTQIA+. Du transgressif aussi qui a poussé les évêques de France à protester contre une scène où ils ont vu une moquerie de la Bible.

    Depuis cette mise en bouche, les jeux battent leur plein et les braillements fusent de toutes parts. Les journalistes hurlent dans le poste entre deux flashs de réclames au bénéfice des sponsors de ces JO, ceux des spectateurs peinturlurés en bleu-blanc-rouge qui braillent croyant ainsi soutenir leurs athlètes favoris, et, hélas, les braillements dont Cécile Dion nous a gratifié en se déchaînant depuis la tour Eiffel pour clôturer la cérémonie du 26 juillet sur une chanson d’Edith Piaf.

    Même le président de la République, un peu inemployé en ce moment, vient montrer sa frimousse sur les stades afin d’occuper ses vacances d’été.

    Toutes ces dépenses somptuaires sont peut-être bien employées mais elles sont superflues, en tout cas déplacées pour un pays surendetté dont les finances publiques sont en déficit systématique depuis 1974. Que les contribuables se rassurent, à peine le rideau tiré sur PARIS-2024 il faudra recommencer à payer pour préparer les JO d’hiver de 2030 attribués aux Alpes françaises à défaut d’autre pays candidat qui, peut-être, ont dû penser que c’était un peu cher payé pour ce que c’est et qu’ils avaient d’autres priorités à financer. La France remporte en tout cas la médaille toutes catégories pour la dépense publique volontaire, place qui n’est contestée par personne d’autre sur la planète.

  • Le Rassemblement National (RN) effraie toujours autant

    Le Rassemblement National (RN) effraie toujours autant

    A l’issue des élections européennes du mois de juin aussitôt suivies d’une dissolution de l’assemblée nationale qui a divisé la nouvelle assemblée en trois blocs d’importance électorale à peu près équivalente, le RN, successeur du Front National (FN) s’est retrouvé aux portes du pouvoir en France avec environ 30% des votes exprimés. C’est le meilleur score jamais réussi par ce parti depuis que Jean-Marie Le Pen, le fondateur du FN dont la fille Marine préside le RN, s’était qualifié pour le second tour des élections présidentielles de 2002, reléguant le candidat socialiste (ancien trotskiste tendance lambertiste) à la troisième place. Opposé à Jacques Chirac le père Le Pen avait été balayé par le « Front républicain » qui s’était mis en place et n’avait rassemblé que 18% des suffrages au deuxième tour. C’était il y a vingt-deux ans.

    Ce 30 juin dernier, le RN et ses associés arrivaient en tête du premier tour des élections législatives avec 33% des suffrages. Aussitôt un nouveau « barrage républicain » est construit afin de limiter le nombre de députés RN à l’issue du deuxième tour et, effectivement, à force d’alliances improbables et de désistements opportunistes, au soir du 7 juillet, le RN et associés n’obtiennent « que » 143 députés alors que certains sondagiers leur prévoyaient au moins la majorité absolue (289 députés) et que le président du parti, bien rasé derrière les oreilles, se voyait déjà nommé premier ministre. Dans les dîners en villes c’est le soulagement : « les fascistes ne sont pas passés ! » Dans le reste du pays c’est la déception : « les bobos urbains nous volent notre victoire ! »

    Lire aussi : La France face à l’aventure

    Le Nouveau front populaire (NFP), association électorale hétéroclite dominée par la gauche propalestienne et son leader Jean-Luc Mélanchon (lui aussi d’origine trotskyste tendance lambertiste), se réjouit de l’efficacité du « barrage contre le fascisme » et aspire au pouvoir sur la base d’un programme électoral radical.

    Dans ces dîners en ville au cœur des quartiers gentrifiés, on se veut se rassurer en se disant que jamais un tel programme ne pourra être mis en œuvre en France, qu’il ne s’agit que de promesses électorales sans conséquences et les convives, qui, le plus souvent, ne l’ont pas lu, se tranquillisent en se disant que leurs impôts n’augmenteront pas et que leur patrimoine sera préservé.

    Lire aussi : Le programme du Nouveau Front Populaire

    La France forte de son histoire révolutionnaire, reste irriguée par une pensée marxiste plus ou moins diffuse mais toujours prégnante dans l’imaginaire collectif poussant ainsi une bourgeoisie aisée à préférer voter pour l’extrême gauche plutôt que l’extrême droite, réduisant ainsi à portion congrue le bloc « central » qui est pourtant à l’origine de leur réussite. Le résultat est aujourd’hui un pays avec à sa tête un gouvernement démissionnaire, un président de la République qui passe son temps à congratuler les athlètes français médaillés aux jeux olympiques PARIS 2024 et une assemblée nationale en vacances, sans majorité réelle où, pour le moment, droite et gauche affirment leur volonté de ne pas collaborer avec le centre, ou alors sur la base de leur programme et uniquement celui-ci. Les choses risquent d’évoluer à la rentrée car il faudra bien gouverner le pays. Si personne ne veut faire de concession Paris pourrait rester avec son gouvernement démissionnaire et le parlement ne plus voter de réforme mais expédier lui aussi les affaires courantes. Et si la loi de Finances 2025 ne peut pas être votée faute de majorité il faudra bien qu’un texte de compromis pour faire fonctionner l’Etat à partir du 01/01/2025, ne serait-ce que pour lever l’impôt et, notamment, payer les salaires et les frais des députés… Sans doute feront-ils preuve d’un minimum de réalisme le moment venu quitte à s’accorder sur un budget irréaliste. Les électeurs en jugeront et, s’ils sont mécontents, il leur restera l’opportunité de voter différemment aux prochaines élections législatives car malgré les craintes de beaucoup, la démocratie n’est pas encore en risque dans le pays.

  • Françoise Hardy est morte

    Françoise Hardy est morte

    Françoise Hardy (1944-2024) est morte ce 11 juin, des suites d’une longue maladie, à 80 ans. Elle a été l’égérie des années yéyé 1960 et bien au-delà. Son beauté androgyne et longiligne, ajoutée à une froideur affichée, a aussi séduit quelques rockers qui se sont affichés avec elle : Bob Dylan, David Bowie, Mick Jagger, Etienne Daho. D’une voix susurrée elle chantait ses propres textes, mélancoliques, tournés vers les amours perdus et la séparation. Elle était sympa Françoise Hardy. Que la terre lui soit légère !

  • MERLE Robert, ‘La mort est mon métier’.

    MERLE Robert, ‘La mort est mon métier’.

    Sortie : 1952, Chez : Editions Gallimard / Le livre de Poche n°688|68.

    C’est un classique de Robert Merle (1908-2004), écrit 7 ans après la fin de la 2e guerre mondiale et la libération des camps de concentration et d’extermination mis en place par l’Allemagne nazie, qu’il fait bon de relire. L’auteur a lui-même été mobilisé en 1939 comme agent de liaison avec les forces britanniques, fait prisonnier dan la poche de Dunkerque et est resté en captivité jusqu’à 1943.

    Librement inspiré de la vie de Rudolph Höss (1901-1947) qui fut commandant du camp allemand d’extermination d’Auschwitz-Birkenau et expérimenta, puis mis en œuvre la « solution finale », sous l’autorité de Himmler patron de l’armée SS. Dans ce livre, Merle imagine ce que fut la vie de Höss, son éducation rigoureuse, son sens du « devoir » et de l’obéissance, son idéologie nazie. Il s’est basé sur les mémoires écrites par l’officier SS emprisonné avant d’être pendu sur le gibet d’Auschwitz, sur le lieu même de ses crimes. Il eut également accès aux comptes-rendus des psychologues qui ont dialogué avec Höss alors qu’il était en prison à Nuremberg avant de comparaître comme témoin au procès international des dignitaires nazis dans cette ville.

    Une très importante littérature a été produite après la guerre pour tenter de comprendre comment la patrie qui avait donné naissance à Bach, Brahms et Goethe avait pu également produire l’idéologie nazie mortifère qui créa l’effondrement de l’Europe et la mort de millions de personnes dont six millions de juifs qui étaient désignés comme l’ennemi définitif de la nation allemande. Le camp d’Auschwitz-Birkenau et son commandant ont souvent servi de cadre à ces analyses tant leur cas s’est révélé paroxystique de la barbarie de ce siècle.

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    « La mort est mon métier », paru assez rapidement après la guerre, en tout cas bien avant la somme d’ouvrages, de films et d’études sur le phénomène nazi au XXe siècle, raconte simplement l’éducation rigoureuse, voire militaire, subie par le jeune Rudolph, sous l’empire d’une foi chrétienne moyenâgeuse. Engagé à 17 ans lors de la première guerre mondiale, il est passé ensuite « naturellement » dans les corps francs qui luttent contre le communisme, avant de finir encore plus « naturellement » dans les SA puis la SS en adoptant ses codes raciaux sinistres.

    Ecrit à la première personne, Höss se raconte et affirme sa détermination totale pour exécuter les ordres et sa volonté d’optimiser les « flux logistiques » des déportés pour que les objectifs d’extermination fixés par sa hiérarchie soient atteints. La déshumanisation du SS fait bien entendu froid dans le dos d’autant plus qu’elle a été confirmée dans la vraie vie, les témoignages et interrogatoire qu’il a produits brillant tous par leur glaçante indifférence face à l’œuvre de mort qu’il accomplissait. Il « faisait son devoir » en se concentrant sur « l’aspect technique de sa tâche » ne cessera-t-il d’affirmer devant ses juges admettant juste qu’il se rendait compte seulement maintenant que ce qu’il avait fait n’était pas bien. Il n’a jamais nié ses actes ni renié l’idéologie qui les avait inspirés.

    Rudolph Höss (1945 – procès de Nuremberg)

    Ce livre de Robert Merle a le mérite d’avoir été l’un des premiers à se pencher sur le sujet, en 1952. Le choix du format-roman lui a permis de synthétiser le personnage tout en faisant œuvre d’historien. Son style clinique semble correspondre à la froideur indifférente que Höss afficha sa vie durant, jusqu’aux pieds du gibet qui a mis fin à son séjour sur terre. Il ne répond bien entendu pas à la question de « comment tout ceci a-t-il été possible au cœur de la vieille Europe ? » mais il rappelle bien à propos que les dérives sont toujours possibles dès que la dictature s’empare des âmes et de la liberté des hommes.

  • Paris franchit le Rubicon de la discorde

    Paris franchit le Rubicon de la discorde

    Les informations du ministère algérien des affaires étrangères étaient les bonnes, la France vient effectivement de baiser la babouche du Roi du Maroc en reconnaissant la souveraineté marocaine sur le Sahara « espagnol » dans une lettre du président de la République adressée à son homologue marocain. Courroucée, l’Algérie a, une énième fois, rappelé son ambassadeur en France. Une nouvelle tempête s’annonce dans le verre d’eau franco-algérien.

    Lire aussi : Un possible retournement de veste français qui surprend

    « Pour la France, l’autonomie sous souveraineté marocaine est le cadre dans lequel cette question doit être résolue. Notre soutien au plan d’autonomie proposé par le Maroc en 2007 est clair et constant. »

    Extrait de la lettre publié par la presse marocaine
    https://www.challenge.ma/sahara-marocain-voici-lintegralite-de-la-lettre-adressee-par-macron-a-s-m-le-roi-284956/

    Le citoyen français se demande vraiment de quoi se mêle-t-on à Paris ? Où sont les intérêts vitaux de la France à s’ingérer dans un conflit régional africain ? Les échecs des expériences récentes d’interventionnisme sur le continent n’ont-elles pas servi de leçon ? A priori non, et c’est regrettable !

    A ce stade et depuis hier, Paris est maintenant réconcilié avec Rabat et désormais fâché avec Alger. Gageons que cette situation va certainement s’inverser un jour, au gré des relations tumultueuses de la France avec ses anciennes colonies. Plutôt que ces montées de tensions subites et ces déclarations d’amour intempestives pourquoi ne pas avoir laissé la situation ante : une relation fraîche avec ces deux pays en les laissant gérer leurs litiges tous seuls comme des grands. Notons d’ailleurs que celui issu de la « guerre des sables » de 1964 n’est toujours pas soldé entre ces deux pays maghrébins.

    De tous les pays membres des Nations-Unies (ONU), la France est la plus mal placée pour interférer dans ce conflit de décolonisation en tant qu’ex-puissance colonisatrice, justement des deux Etats qui se disputent ce bout de désert anciennement colonisé par l’Espagne. Paris ne sera qu’une source additionnelle de troubles et prendra des coups venant des deux côtés. Nous n’arrivons déjà pas à décoloniser la Nouvelle Calédonie, qu’allons donc nous faire dans cette nouvelle galère saharienne ?

    Le psychodrame continue, grandeur et décadence d’un ex-Empire !