Patti Smith – 2007/05/28 – Paris l’Olympia

Patti est de retour à Paris pour un de ces shows « chair de poule » comme seuls les artistes d’un autre monde savent en délivrer. Et toujours lorsque cette poétesse incomparable entre en scène elle exhume toute notre vie musicale cachée dans le lobe émotion de nos cerveaux. Comme dans un dernier soupir elle nous accompagne sur la frontière ténue entre le plaisir musical et l’introspection intime. Une grande dame qui superpose avec tellement de subtilité les mots et les notes sous l’étendard du Rock ‘n’ Roll le plus pur.

Les fidèles Lenny Kaye, guitariste, affublé comme toujours de ses gilets démodés, et Jay Dee Daugherty à la batterie, emmènent une set list idéale où se mêlent quelque unes des reprises objet de son dernier disque Twelve et les jalons musicaux d’un parcours exceptionnel entamé il y a 30 ans avec Horses. La tignasse grisonnante (elle vient d’avoir 60 ans) et toujours fringuée comme l’As de Pique, cette musicienne de légende nous fait partager ses révoltes comme ses nostalgies avec la foi d’une survivante. Sa voix n’a pas pris une ride. Elle en use et en abuse avec adresse et parfois violence.

Malgré le formatage intellectuel marketé par l’industrie du disque et en dépit de l’abrutissement des masses généré par les médias, elle reste sereine et convaincue de son message, de sa mission. Lorsque Patti joue de la clarinette sur Are You Experienced  de Hendrix, se fait accompagner par un luth sur Smells Like Spirit de Nirvana, ou déclame des poésies après avoir chaussé ses lunettes rondes, ce sont les Dieux qui parlent aux Dieux. Et quand elle soulève petits et grands sur Rock ‘n’ Roll Nigger et Because The Night elle ne voit pas de réel motif de dévier de sa route, celle de la sincérité brute d’une rockeuse qui a voulu changer le monde avec des chansons et des poèmes. Et elle y a réussi puisqu’elle donne du rêve, elle diffuse de l’énergie, elle montre la nécessité de savoir s’indigner, elle oriente la vie de chacun vers le cœur et l’intelligence quand tout dans notre monde moderne tend à faire dériver les individus vers l’illusoire et l’égoïsme.

Patti reste avec Lou Reed la grande prêtresse de la poésie underground. Ils ont traversé cette période à part, parfois excessive, mais tellement américaine, qui a si fortement influencé le Rock d’aujourd’hui. Et d’ailleurs Lou sera à Paris dans quelques jours… L’un et l’autre nous convient régulièrement à ces messes dites bien sûr sur un mode différent mais ils ne manquent jamais de communiants pour partager cette musique des anges qui parfois se transforment en démons, mais parfois seulement !

La set list : Privilege/ Redondo Beach/ Birdland/ Are You Experienced/ Free Money/ Within You Without You/ Southern Cross/ Pastime Paradise/ White Rabbit/ Because The Night/ Pissing In A River/ Soul Kitchen/ Peaceable Kingdom/ Gloria/ Smells Like Teen Spirit/ Rock n Roll Nigger/ Helpless