Sandinista !

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1980 – le quatrième album des Clash

Les plus anciens se souviennent des années 1960/1970 de lutte du Front sandiniste[1] de libération nationale contre la dynastie Somoza de dictateurs au Nicaragua se présentant comme anticommunistes. Nous étions en pleine guerre froide, les Etats-Unis d’Amérique s’opposaient à tous les mouvements révolutionnaires qui tentaient de s’implanter en Amérique latine sur le modèle de Cuba, au besoin en soutenant financièrement et militairement des satrapes, galonnés ou pas.

On a ainsi vu la mise en place de régimes sinistres et violents, en Argentine, au Chili, au Nicaragua et dans toute la région. Autre époque, il fallait choisir son camp et la démocratie était peu compatible avec la lutte contre le marxisme. Aujourd’hui, la plupart de ces pays sont revenus vers des régimes plus démocratiques mais il reste quelques abcès de fixation comme le Venezuela ou le Nicaragua.

Fin 1979 Anastasio Somoza quitte le pays pour se réfugier d’abord à Miami puis au Paraguay où il sera assassiné un an plus tard par un commando nicaraguayen. Les Clash sortaient en 1980 leur légendaire triple album « Sandinista » en soutien à la cause.

Daniel Ortega, l’un des leaders du mouvement sandiniste prend le pouvoir après la fuite du dictateur et met en place un système inspiré de la révolution cubaine. Les Etats-Unis de leur côté agissent en sous-main pour couler ce régime par des moyens plus ou moins légaux. On se souvient de « l’Irangate » dévoilé en 1986 qui montra comment Washington vendit illégalement des armes à l’Iran (son ennemi intime) dont le produit servit à financer les « contras », mouvements de guérillas antisandinistes, ou du trafic de cocaïne institutionalisé par la CIA toujours pour financer la contrerévolution sans passer par le parlement américain qui s’y serait a priori opposé. Les Etats-Unis avaient aussi miné les ports du Nicaragua pour en bloquer les exportations.

Puis les choses s’apaisèrent dans les années 2000 et suivantes au cours desquelles le pays progressa au niveau économique. Mais 40 ans plus tard, Daniel Ortega, 76 ans, est toujours dans l’arène politique et vient de se faire réélire président de la République en novembre 2021 pour la énième fois. Il connut des vicissitudes au cours de toutes ces années, rentra dans l’opposition, mena des alliances improbables avec des libéraux, des coopérations avec les antioccidentaux de la planète (Yasser Arafat, Vladimir Poutine, Mouammar Kadhafi, les Castro et bien d’autres), fut élu président, continua à exercer un pouvoir en sous-main lorsqu’il ne l’était plus, modifia la constitution en sa faveur, emprisonna puis libéra ses opposants et, toujours, il réussit à survivre politiquement ; un exploit quand on mesure les adversaires auxquels il s’est frotté !

Son épouse est vice-présidente, c’est plus simple ainsi. Elle est poétesse, un peu voyante et envahit les médias locaux tous les jours avec sa communication pro-sandiniste. D’une dictature à l’autre, on peut dire que les Ortega sont plus malins que les Somoza pour rester au pouvoir. Le pays quant à lui, survit !


[1] En référence au général Sandino qui s’était révolté, déjà, dans les années 1910 contre la présence permanente de troupes américaines au Nicaragua et la mainmise des banques et entreprises américaines sur l’économie locale.